Depuis quelques années, on assiste à une tendance rampante mais bien réelle à vouloir modifier les compétences respectives des différents acteurs en matière d’aménagement du territoire et cela au…
Depuis quelques années, on assiste à une tendance rampante mais bien réelle à vouloir modifier les compétences respectives des différents acteurs en matière d’aménagement du territoire et cela au détriment des cantons. La modification partielle de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire sur laquelle le peuple se prononcera prochainement est particulièrement révélatrice de cette dérive vers la centralisation qui voit en la Berne fédérale « la Grande Aménagiste en Chef », seule et unique détentrice de la Vérité en la matière, au besoin en mettant sous tutelle les cantons.
Si on ne peut nier les inquiétudes de la population face à certaines évolutions constatées, les solutions concoctées au niveau fédéral, sous prétexte de dégager des compromis face à la pression d’initiatives populaires extrêmes, risquent au contraire d’aggraver encore la situation. Vouloir imposer d’en haut des lignes directrices uniformes et donc inadaptées aux spécificités des différentes régions ne peut que susciter amertume, blocage et échec.
Face à ces dérives, il est indispensable de respecter les dispositions constitutionnelles et de concéder aux régions un cadre leur permettant un développement correct et harmonieux. Et pour cela, il faut se baser sur des faits chiffrés reflétant la réalité concrète. Or, on se rend immédiatement compte que le facteur principal générateur des problèmes croissants en matière d’aménagement du territoire est bien d’ordre démographique ; et la part de l’immigration est essentielle dans ce constat. Si on peut se réjouir de la dynamique économique de ces 10 dernières années qui a conduit à la création de 600’000 nouveaux emplois, on remarque que plus de la moitié de ceux-ci sont le résultat de l’immigration et concentrés essentiellement dans le secteur des services. Ajoutez à cela une tendance à l’augmentation de la surface habitable par personne et vous avez déjà une grande partie de l’explication de la diminution croissante des terres agricoles. En effet, comme le territoire suisse est composé de surfaces improductives ou déjà urbanisées et que la forêt de par la loi actuelle est quasiment intouchable, gagnant même de la surface au détriment de l’aire agricole, il est facile de comprendre que la pression se porte essentiellement sur les surfaces agricoles cultivables. Or, ce grignotage continuel représente une dangereuse épée de Damoclès pour le degré d’auto-approvisionnement de notre pays ; il accentue encore la dépendance de la Suisse qui est déjà la championne du monde des importations nettes de denrées alimentaires, ce qu’on a tendance à oublier alors qu’une nouvelle crise alimentaire mondiale est annoncée par de nombreux spécialistes.
Faut-il pour autant bouleverser les compétences telles que définies à l’article 75 de la Constitution fédérale ? Clairement non. Imposer une politique d’urbanisation par le haut aurait de graves répercussions. Ce qui est positif pour une grande agglomération n’est pas nécessairement idoine pour une région périphérique. Et certaines mesures dirigistes mitonnées dans les services fédéraux pour résoudre des problèmes définis sont tout aussi inadaptées. Par exemple, vouloir limiter la surface habitable par personne est tout simplement inacceptable d’un point de vue libéral ; des mesures pratiques peuvent déjà être mises en place en augmentant la densité des constructions en hauteur et en profondeur pour améliorer la situation. Et la Confédération doit se concentrer sur ses compétences essentielles telles celles qui l’autorisent aujourd’hui déjà à prendre des dispositions visant à rigoureusement maîtriser l’immigration. Encore faut-il en avoir la volonté politique.
D’autre part, une politique centralisatrice uniforme comprend aussi le risque de négliger les potentiels de développement important que recèlent les zones périphériques de notre pays. Or, tant sur le plan touristique que celui de la production de denrées alimentaires, ces régions sont aussi susceptibles d’assumer des fonctions essentielles pour notre pays. Un affaiblissement du fédéralisme en matière d’aménagement du territoire conduirait certainement à restreindre leurs futures possibilités de développement ce qui n’est pas admissible.
C’est pourquoi il convient de combattre avec détermination toutes les velléités de la Confédération visant à miner les compétences des cantons et des communes en matière d’aménagement du territoire tout comme il s’agit de respecter absolument les principes cardinaux que sont la garantie de la propriété et le libre choix des moyens de transport.